Souvent invoquée (à tort) pour réprimer une rave party qui devient hors de contrôle, l’agression sonore est en réalité plus grave. Car au-delà de la contravention de tapage, elle constitue un délit puni par le Code pénal.
Passer l’aspirateur dans son logement en pleine nuit, diffuser de la musique excessivement forte pendant plusieurs nuits successives, faire profiter ses voisins de ses talents de professionnels du BTP en pleine nuit : la malveillance de l’agression sonore est souvent flagrante.
Bien plus que les bruits inévitables relevant du droit de chacun à faire tourner son quotidien, il s’agit de bruits excessivement perturbants pour l’entourage.
Au-delà de ses aspects juridiques, l’agression sonore a des répercussions considérables sur ceux qui les subissent. Elle perturbe la vie professionnelle, le bien-être ainsi que la santé des victimes.
Au vu de ces risques, la loi prévoit des sanctions variées, selon les conditions dans lesquelles l’infraction est commise. Mais avant tout, il est essentiel de comprendre ce qu’est réellement l’agression sonore.
Qu’est-ce qu’une agression sonore ?
Le Code pénal reconnaît l’agression sonore comme un délit, et prévoit des sanctions pénales pour réprimer les responsables. D’un point de vue juridique, parler d’agression sonore tout court constitue néanmoins une omission des plus sérieuses.
Il s’agit, plus exactement, d’agressions sonores en vue de troubler la tranquillité d’autrui.
Ce qu’est l’agression sonore
L’on parle d’agression sonore lorsque des bruits nuisant à la tranquillité d’autrui sont délibérément émis. L’ancienne définition du Code pénal associait deux caractéristiques spécifiques à ce délit :
- L’intentionnalité dans la nuisance sonore émise ;
- La récurrence de l’acte répréhensible.
Depuis 2003, la mauvaise foi de l’auteur des bruits à elle seule suffit pour condamner cette infraction.
Si les troubles sonores délibérés constituent incontestablement un délit, la passivité des responsables l’est tout autant. Même lorsque la perturbation n’est pas préméditée, laisser le bruit se poursuivre après l’avoir constaté, sans tenter d’y mettre fin, est considéré comme une agression sonore.
Ce que n’est pas une agression sonore
L’agression sonore et le tapage nocturne appartiennent à deux types d’infractions. Le tapage nocturne fait partie des contraventions, regroupant les fautes les moins graves sur l’échelle des infractions.
L’agression sonore est, quant à elle, reconnue comme étant un délit. À mi-chemin entre la contravention et le crime, elle entre dans la catégorie des infractions de gravité moyenne. Par ailleurs, les peines appliquées ne sont pas les mêmes. Il est donc essentiel de faire la différence.
À titre d’exemple, le trouble occasionné par une rave party, du fait d’une organisation défaillante, constitue donc un tapage. Il ne s’agit pas d’une agression sonore. Selon la Cour d’appel de Toulouse, l’initiative de choisir des lieux isolés dans l’organisation de ces événements prouve l’absence d’intention de nuire.
Exemples d’agressions sonores
Voici quelques situations concrètes permettant de mieux comprendre comment se manifeste une agression sonore.
Lorsque l’acte est perpétré de manière volontaire
Dans un appartement, un des habitants porte plainte contre son voisin de dessous, pour agression sonore. Et pour cause, le prévenu assaille son plancher de coups de balai. Au constat des marques inexpliquées sur le plafond du concerné, les forces de l’ordre confirment les fondements de l’accusation.
Un couple du quartier de Courteille a lui aussi expérimenté les méfaits d’agressions sonores causées par leurs voisins. Ils endurent les sons tumultueux de bricolage et de réaménagement mobilier à toute heure, mais aussi les insultes des prévenus lorsqu’ils demandent d’arrêter les bruits.
Par la suite, les victimes se sont retrouvées en état de stress sévère et ont été contraintes de prendre plusieurs jours d’incapacité temporaire totale.
Lorsque le trouble non intentionnel s’éternise
Ne pas faire de bruits délibérément est une chose, mais ne rien faire alors qu’on en est l’origine en est une autre, puisque le fait est que cela affecte autrui. En 2012, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence relate un fait de ce type.
Une dizaine de chiens d’une propriété aboyaient sans arrêt, de jour comme de nuit, nuisant ainsi à la tranquillité publique. Mis en garde par la police, le propriétaire n’a pris aucune disposition concrète pour empêcher le trouble.
Ce que dit la loi sur les agressions sonores
En France, plusieurs lois régissent les bruits. De plus, le Code de santé publique interdit tous les sons qui portent atteinte à la santé publique. En droit civil, ces nuisances se rapprochent de troubles anormaux du voisinage. Les agressions sonores, pour leur part, relèvent du droit pénal.
Ce qu’en dit le Code pénal
Les dispositions leur concernant sont mentionnées dans l’article 222-16 du Code pénal, parmi les atteintes volontaires à l’intégrité de la personne.
L’article en question place ce délit dans le même registre que :
- Les appels téléphoniques malveillants réitérés ;
- Les envois répétitifs de messages malveillants, par voie électronique.
Quelles sont les peines prévues ?
Pour ce qui est des sanctions, les auteurs de l’agression sonore sont passibles d’une amende de 15 000 euros et d’un an de prison.
Lorsque le responsable est pacsé, marié ou concubin de la victime, les sanctions sont plus lourdes. L’amende grimpe à 45 000 euros et la peine d’emprisonnement est de trois ans.
Il est à noter que les personnes morales peuvent aussi être inculpées pour agression sonore. Dans leur cas, l’amende réclamée peut atteindre 75 000 euros.
Que faire en cas d’agression sonore ?
Dans le cas d’une agression sonore, l’approche amiable entre voisins peut s’avérer inefficace. Il est alors recommandé de s’en référer aux officiers de police judiciaire, dont le Maire de la localité concernée, ou un commissaire de justice.
Les agressions sonores peuvent également donner lieu à des poursuites judiciaires, devant un tribunal pénal. En droit civil, les troubles anormaux du voisinage peuvent être invoqués parmi les charges.
Risques en cas d’agression sonore
Pourquoi ces fortes sanctions lorsqu’une accusation d’agressions sonores est vérifiée ? La réponse est simple : les bruits excessifs ont des effets négatifs considérables. Vu que l’agression sonore est un acte délibéré, la peine est logiquement décuplée.
Pour en revenir aux méfaits des bruits, une étude réalisée sur 4 391 personnes en région Ile-de-France le prouve. Les résultats de cette recherche sur des domiciles survolés par des avions montrent que
- le risque d’hospitalisation cinq fois plus important auprès des femmes de 15 à 39 ans ;
- Le risque d’hypertension est aussi multiplié par cinq pour les hommes de 40 à 69 ans.
Par ailleurs, l’analyse conclut que, chez les femmes de 40-69 ans évoluant dans des milieux très bruyants, les risques d’anxiété et de dépression sont élevés.
La productivité et la sécurité au travail s’en trouvent également affectées. L’INRS identifie le bruit parmi les facteurs de risque d’accident de travail. Un environnement de travail bruyant a pour effet de :
- Brouiller les signaux d’alerte ;
- Entraver la communication verbale entre les collaborateurs ;
- Perturber la concentration des professionnels.
En somme, l’agression sonore a un impact significatif sur la santé mentale et la qualité de vie. Il s’agit d’un délit condamné par le droit pénal. Lorsqu’elle se présente, il est essentiel de prendre les mesures adaptées pour y mettre fin, conformément à la loi.